A l’occasion d’une recherche rapide pour un membre du forum sur les oiseaux des forêts, j’ai localisé un nid de Pouillot siffleur avec trois jeunes. J’ai fait deux séances d’affût et j’ai assisté au départ des jeunes. De quoi faire un petit reportage rapide de 12 images, sans reprendre dans mon stock ancien.
En Normandie nous accueillons quatre espèces de Pouillots. Le véloce, le fitis : inféodé plus aux zones humides, le bonelli : ici en limite nord de répartition il exige des territoires au sol chaud et le siffleur : spécifique des hêtraies.
1- Il est reconnaissable à ses teintes jaunes et son poitrail blanc, un sourcil jaune pâle et à ses longues rémiges primaires. Son chant sifflé est terminé par une trille montante. Le dimorphisme sexuel est subtil et chez certains individus, comme pour ce couple, je ne m’ avance pas à les distinguer.
C’est un grand voyageur qui passe l’hiver de l’autre côté du Sahara. Il revient en Normandie quand les premières feuilles de hêtres débourrent, soit début mai.
Ici dans cette parcelle de Sapin blanc (Abies alba) les forestiers ont intercalé toutes les 4 ou 5 lignes une rangée de hêtres, d’où sa présence.
Images cliquables en 1280



2- le nid est construit au sol, souvent à proximité de branches basses et au sol de branches mortes permettant le dernier arrêt avant l’accès au nid. Il est souvent accolé à un pied de myrtille ou un pied de molinie mais peut aussi être construit dans la litière de feuilles. Fabriqué essentiellement de feuilles de molinies, c’est une coupe qui ne dépasse pas le niveau du sol, elle est surmontée d’un «couvercle » avec une petite avancée dissimulant l’intérieur du nid. C’est pendant cette période de construction qu’il est le plus facile à trouver, sinon sa découverte est compliquée et il faut ne pas marcher dans la zone estimée pour ne pas le piétiner avant de l’avoir parfaitement localisé.


3- la ponte a lieu très vite souvent vers le 20 mai, 6 œufs en moyenne, une seule nichée sauf échec comme dans le cas présent vue la date (ponte de remplacement). Le nombre de trois jeunes seulement sans œufs clairs restant dans le nid le confirme.
La femelle assure l’incubation puis l’élevage en couple peut débuter. Les proies apportées sont principalement des Sauterelles du chêne récoltées dans la canopée environnante. Des papillons de nuit et des chenilles vertes.


4- la tente affût a très vite été adoptée mais les parents me regardaient régulièrement après le nourrissage au travers de la lentille du 500. A trois reprises un d’eux a fait du vol stationnaire tout près du pare-soleil pour comprendre ce nouvel environnement.


5- puis ce fut l’heure de la sortie. En moins d’une minute par petits bonds successifs les trois jeunes à peine âgés de 12 jours se sont présentés sur la plateforme devant le nid puis ont disparu du champ de l’objectif.


6- je les ai retrouvés sur trois perchoirs différents d’une branche de Sapin blanc, tout près du nid, les découvrant pour la première fois. Leur développement quelque peu différent aussi.


7- premier nourrissage hors du nid.


8- mais voilà le goût de l’aventure, les grands espaces… ils ne tenaient pas en place, sitôt la becquée avalée ils s’échappaient de quelques mètres à chaque fois, bien entendu dans des directions opposées.
Nous étions trois à chercher celui-ci. Je suivais l’adulte depuis la petite fenêtre latérale de la tragopan. Quand il s’est arrêté sur une branche d’un tronc de sapin, le jeune était à son pied, en même temps j’apercevais la silhouette d’un épervier qui venait de se poser tout près. Je croise juste son regard scrutant le sol.


9- je le vois plonger et repartir se percher, une patte pendante tenant l’infortuné oisillon. Je tente une photo mais trop de végétation fait patiner l’AF. Il vient très vite se poser sur une petite souche pour plumer et dépecer sa proie.


10- limitant au maximum mes mouvements, je suis obligé de déplacer la façade de l’affût pour espérer une fenêtre plus large.


11- il passe du temps à se remettre quelques plumes qui ont souffert lors de l’attaque, tout en continuant à tirer sur le jeune plumage de sa victime. Encore un mouvement de l’affût et il disparait. J’entends les cris plaintifs de l’adulte qui appelle pour localiser son rejeton


12- je découvre ce deuxième pas très loin, très visible, perché à 50cm du sol, complètement dégagé, celui-là à échappé au prélèvement de cette journée. Et la vie continue.


Voilà, l’opportunité d’une prédation n’étant pas coutumière (au moins pour moi) j’ai voulu partager ce moment intense avec vous.

C'est un reportage agréable, bien argumenté et bien illustré

Un reportage intéressant dont je retiens en particulier les nourrissages (7 et 12) et la scène de prédation par l'épervier, en effet intense et rarement mise en images

Tu illustres à merveille les dures lois de la nature avec ce petit reportage très bien fait, bravo

superbe reportage bien agrémenté de jolies photos et de commentaires extra ! les scènes de nourrissage sont superbes , mais qui dire de celles de l'épervier .... la sélection naturelle est faite .

Un beau suivi de la nidification du pouillot avec un exemple parlant du destin tragique qui attend beaucoup d'oisillons !
Merci pour ce reportage !

Séquence du début jusqu'à la fin, rapide, pour l'un !
Excellent reportage.

Excellent "travail" si s'en était un, mais quel plaisir partagé ! Et la prédation, un Grand moment de nature !

Jacques et bien quel reportage au devant de cette histoire qui nous donne les dures réalités de la nature.

Vraiment très bien mes félicitations.

Gygy

Merci pour vos retours

Alain , je connais tes réticences à montrer ces scènes de nourrissages, qu'elles concernent les passereaux ou les rapaces, ce qui m'a guidé dans le fait de poster c'est la chute inattendue et qui pour moi ne devait pas être le sujet premier.

Jacques!
Voilà du lourd avec cet intéressant reportage agrémenté de photos tip-top
Préférence s'il en faut une pour ce petit clin d'œil que te fait l'adulte sur la 4!
Dure dure la nature quand même, ainsi va la vie...

Très intéressant avec des scènes rarement captées

Alain

Merci à vous tous (tes)!

La classe ce reportage ,quand on pense à tout le travail de recherche ,de préparation en amont dans le plus grand respect de la nichée (le résultat le prouve ) il faut signaler que ce genre de travail n'est pas à la portée de tous et que seuls quelques connaisseurs comme toi peuvent "tenter" ce genre d'approche .
Les clichés sont d'excellente qualité malgré les conditions de pdv compliquées .
Et la fin est un grand moment "de vie" duquel tu as été un témoin privilégié .J'imagine ton ressenti pendant ces instants :émotion du "reporter" tristesse surement car tu avais accompagné cette petite famille depuis quelques jours et tu t'y étais surement attaché.
Bref : !
Amitiés
Dom

Merci Dominique mais je vais paraître un peu froid...j'ai l'habitude de contacter des nichées à tous les stades , principalement des passereaux et il faut savoir que pas plus de la moitié arrivent avec des jeunes à l'envol. Les prédateurs opèrent de l’œuf à l'oisillon sorti du nid (la preuve) . J'ai eu la chasse d'assister en direct à l'une d'elle et c'était le sens premier du fil , même si le titre n'y faisait pas allusion. Certaines espèces compensent le lourd tribu payé en produisant beaucoup de jeunes (comme les mésanges, les foulques, les poules d'eau, les canards etc. D'autres ont une production de jeunes faible mais vivent plus longtemps. Tout s'équilibre quand il s'agit des interactions entre les animaux... beaucoup moins quand les hommes interférent malheureusement.